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GUILLAUME GARDET
Avocat médiateur - Docteur en droit

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Requalification par le juge d’une mesure d’hospitalisation à temps partiel en hospitalisation complète : les abus de la psychiatrie

Le 29 juin 2014
Les modalités de l’hospitalisation à temps partiel ne peut comporter des mesures de contraintes équivalentes à une mesure d’hospitalisation complète sous peine de mainlevée.


L’hospitalisation à temps partiel ne saurait dans ses modalités, adopter des mesures de contraintes équivalentes à une mesure d’hospitalisation complète sous peine de constituer une mesure liberticide et attentatoire aux droits des patients. Il relève de la mission du Juge des libertés et de la détention (JLD) de vérifier si le programme de soin constitue une hospitalisation à temps partiel ou une mesure d'hospitalisation complète déguisée.

  Certains établissements psychiatriques tentent impunément de contourner la mainlevée d’une mesure de soins sans consentement en hospitalisation complète prononcée par le JLD en y substituant, par le biais du programme de soins, un cumul de plusieurs modalités, ce qui revient alors à maintenir une emprise et une contrainte sur le patient équivalente à l’hospitalisation complète.

En pratique, le médecin traitant définit alors un programme de soin basé sur une hospitalisation à temps partiel, en l’assortissant de nombreuses restrictions à tel point que les modalités prescrites dans ce programme de soin recréent à l’identique les conditions d’une modalité d’hospitalisation complète.

Or, Les mesures prévues par le programme de soins définies à l'article R.3211-1 du Code de la santé publique (CSP), dont l’hospitalisation à temps partiel, ne peuvent être exercées sous la contrainte, les soins ne  peuvent-être imposés de manière coercitive et le patient ne peut être conduit ou maintenu de force.

Toutefois le médecin traitant peut menacer le patient, en cas de non respect par ce dernier du programme de soins, de demander contre lui une nouvelle mesure d’hospitalisation complète.

Dès lors, une telle pratique constitue une atteinte manifeste aux droits des patients.   Les responsables des programmes de soin pensent-être à l’abri de tout grief dans la mesure où, selon eux, le Juge n'aurait pas compétence pour se prononcer sur les modalités de soins.

Or, la décision n° 2012-235 QPC du 20 avril 2012 du Conseil constitutionnel précise concernant spécifiquement ces mesures d'hospitalisation partielle de l'article L.3211-2-1 du CSP, que le JLD peut être saisi à tout moment, aux fins d'ordonner la mainlevée immédiate de telles mesures, dans les conditions de l'article L.3211-12 dudit code.

En conséquence, s'il n'appartient pas au juge des libertés d'apprécier le contenu des mesures, il lui incombe de vérifier qu'elles figurent parmi celles prévues par l'article R.3211-1 du CSP.

Il lui appartient notamment, s'agissant des mesures d'hospitalisation, qui portent particulièrement atteinte à la liberté d'aller et de venir, de vérifier si l'hospitalisation mise en place constitue effectivement une hospitalisation à temps partiel ou une hospitalisation complète déguisée.

Ainsi, l’une des pratiques des établissements est d’incorporer, dans la modalité de l’hospitalisation à temps partiel de l’article R.3211-1 du CSP, celles prévues par les dispositions de l’article L.3211-11-1 du CSP, restreignant la liberté et d’allée et de venir du patient, caractérisant ainsi, non pas une hospitalisation à temps partiel, mais une hospitalisation complète assortie de sorties de courte durée ou de sorties non accompagnées d'une durée maximale très restreinte.   Dans l’arrêt reproduit ci-après, la Cour d’appel de VERSAILLES constatait que les sorties à la journée, une à deux fois par semaine, et une nuit par semaine au domicile de la mère du patient, présentent manifestement les caractères non d'une hospitalisation à temps partiel, mais d'une hospitalisation complète assortie de sorties de courte durée ou de sorties non accompagnées d'une durée maximale de 48 heures, telles que prévues par l’article L.3211-11-1 du Code de la santé publique.
En conséquence, la Cour d’appel confirme la position du JLD qui avait initialement sanctionné la mesure litigieuse.
  VERSAILLES 21 mars 2014 R.G. n° 14/ 01854
Vu le recours formé le 10 mars 2014 par le directeur du groupe hospitalier Paul Guiraud contre l'ordonnance rendue le 28 février 2014 par le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Nanterre, qui a constaté la mainlevée de la mesure d'hospitalisation sous contrainte résultant de l'ordonnance du Premier Président de la cour d'appel de Versailles du 14 février 2014, a dit que le régime de soins mis en place à compter de cette date ne constitue pas un programme de soins ambulatoires au sens de l'article L.3211-1 du Code de la santé publique, et a dit que la mesure d'hospitalisation sous contrainte de Mme B... A... Y... devra prendre fin à effet différé au plus tard à 24 heures, de ce jour.
(...) Par ordonnance du 14 février 2014, le Premier Président de ce siège, saisi sur l'appel de la décision du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Nanterre, a constaté que Madame B... A... Y... avait été admise sans titre en hospitalisation complète pendant trois jours, que l'absence de décision avait nécessairement eu pour effet d'empêcher la notification de ses droits et de la priver des voies de recours, que cette irrégularité a eu pour effet de porter une atteinte grave aux libertés fondamentales de Madame A... , Y.... Il a, en conséquence, prononcé la mainlevée de la mesure d'hospitalisation avec effet différé de 24 heures pour mettre en place un programme de soins. A la suite de cette décision, le directeur du Centre hospitalier a décidé la mise en place d'un programme de soins. Madame B... A... Y... estime que le programme mis en place constitue en fait une hospitalisation complète. Elle a saisi le 18 février 2014 par l'intermédiaire de son avocat, le juge des libertés et de la détention qui a fait droit à sa demande par l'ordonnance déférée. Le directeur du groupe hospitalier Paul Guiraud nous demande de dire que le régime des soins mis en œuvre dans le cadre d'un programme de soins en date du 14 février constitue un programme de soins au sens des articles L 3211-2-1 et R 3211-1 du code de la santé publique ; que le juge des libertés et de la détention n'a pas la compétence pour se prononcer sur le contenu du programme de soins ; et, en conséquence, d'infirmer la décision de mainlevée ordonnée en première instance. (...) Son avocat nous demande de confirmer l'ordonnance déférée, car le juge des libertés et de la détention est gardien des libertés, et doit pouvoir apprécier le contenu d'un programme de soins. (...) En application des dispositions des articles L.3212-1, L.3211-2-1, L.3211-12 et L.3211-12-1 du Code de la santé publique, une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l'objet de soins psychiatriques sans consentement sur la décision du directeur d'un établissement de soins que si les troubles mentaux qu'elle présente rendent impossible son consentement et s'ils imposent des soins immédiats assortis soit d'une surveillance médicale constante, justifiant une hospitalisation complète, soit une surveillance médicale régulière dans le cadre d'un programme de soins établi par un psychiatre de l'établissement d'accueil. Le juge des libertés et de la détention est compétent pour apprécier la régularité de la procédure et le bien fondé de la mesure ordonnée. Il doit être obligatoirement saisi lorsque le patient est pris en charge sous la forme d'une hospitalisation complète, à différents moments de la procédure ou à la requête du patient. Il peut également être saisi à tout moment aux fins d'ordonner à bref délai la mainlevée immédiate d'une mesure de soins psychiatriques sans consentement, quelle qu'en soit la forme, et donc d'un programme de soins. En effet, si, dans le cadre d'un programme de soins, les soins ne peuvent être imposés au patient de manière coercitive, et si celui-ci ne peut être conduit ou maintenu de force dans l'établissement prévu, le refus de soins ou le non respect par le patient du programme de soins peut conduire le médecin à proposer une hospitalisation complète. Selon les dispositions de l'article R.3211-1 du code de la santé publique, le programme de soins indique si la prise en charge du patient inclut une ou plusieurs des modalités suivantes : Une hospitalisation à temps partiel ; (...) Par arrêt rendu le 20 décembre 2013, le conseil d'État a considéré que le fait que ce texte n'impose pas un délai minimal entre deux périodes de présence du patient en hospitalisation partielle ne porte pas atteinte aux libertés fondamentales, d'autant plus que les mesures prévues par le programme de soins ne peuvent être exercées sous la contrainte et que le juge des libertés et de la détention peut être saisi à tout moment. En conséquence, s'il n'appartient pas au juge des libertés d'apprécier le contenu des mesures, il lui incombe de vérifier qu'elles figurent parmi celles prévues par l'article R.3211-1 du code de la santé publique. S'agissant des mesures d'hospitalisation, qui portent particulièrement atteinte à la liberté d'aller et de venir, il lui incombe de vérifier si l'hospitalisation mise en place constitue effectivement une hospitalisation à temps partiel. Le certificat médical du 14 février indique que la prise en charge en programme de soins inclut une hospitalisation à temps partiel, l'existence d'un traitement médicamenteux dans le cadre des soins psychiatriques. Il est précisé que le programme de soins se poursuit selon les modalités suivantes : des autorisations de sortie seule, une à deux journées, avec une nuit par semaine au domicile de sa mère. Les modalités de l'hospitalisation, limitant les sorties à la journée, une à deux fois par semaine, et une nuit par semaine au domicile de sa mère, présentent manifestement les caractères non d'une hospitalisation à temps partiel, mais d'une hospitalisation complète assortie de sorties de courte durée ou de sorties non accompagnées d'une durée maximale de 48 heures, telles que prévues par l'article L 3211-11-1 du code de la santé publique. Dès lors, c'est à juste titre que le juge des libertés et de la détention a considéré que l'hospitalisation complète de Mme B... A... Y... était maintenue malgré la décision du Premier Président y mettant fin, et a rendu la décision déférée. (...) PAR CES MOTIFS (...) Confirmons l'ordonnance déférée (...)